De la sexualité des orchidées
Libé a déjà eu l’occasion de manifester dans ses pages le grand respect inspiré par cette conférence-spectacle et surtout pour son objet : la sexualité des fleurs, vers laquelle la géniale Sofia Teillet nous entraîne en partant – paperboard et powerpoint à l’appui – de sa détestation de l’orchidée, une fleur «louche» que l’on croise dans à peu près «toutes les toilettes des restaurants chinois» et qui évoque sans subtilité aucune une vulve. Il est temps de lui régler son compte, en fêtant l’avènement d’une grande humoriste-botaniste.
De la sexualité des orchidées, de Sofia Teillet, les 8 et 9 octobre au théâtre de la Croix-Rousse (Lyon), du 13 au 21 octobre au Centquatre (Paris).
Huit Heures ne font pas un jour
La toute nouvelle directrice du CDN de Saint-Denis Julie Deliquet ouvre la saison par son adaptation de Huit Heures ne font pas un jour, une mini-série de Fassbinder diffusée en Allemagne en 1972, et quasi inconnue en France. Cette montée d’une utopie concrète à l’intérieur d’une usine devrait résonner fortement. Après la mise au plateau d’Un conte de Noël et de Fanny et Alexandre, cette nouvelle création s’annonce comme un spectacle politique et enlevé, qui renoue avec un optimisme qu’on croyait inaccessible.
Huit Heures ne font pas un jour, d’après R.W. Fassbinder, mise en scène Julie Deliquet, au théâtre Gérard-Philippe (Saint-Denis), du 29 septembre au 17 octobre, puis en tournée.
Double Murder : Clowns /The Fix,
Cuts lumineux, contrechamps, effets travelling, gros son et fureur collective… Le tout au service d’une danse de reptiles, toujours tendue entre ambiance Teknival et réminiscences des cérémonies juives. Le chorégraphe britannique star Hofesh Shechter balance son artillerie lourde sur le plateau du Châtelet à Paris, avec deux pièces, une danse macabre clownesque créée pour le Nederlands Dans Theater, qui fit l’objet d’une adaptation cinématographique produite par la BBC, et une nouvelle création basée sur l’extase.
Double Murder : Clowns /The Fix, de Hofesh Shechter, du 5 au 15 octobre au théâtre du Châtelet (Paris)
Le Passé, de Léonid Andreev
Quelles traces garde-t-on des mondes disparus et pourtant si proches ? Quels détails ou pratiques oubliés sont susceptibles de les faire renaître ? C’est le genre d’interrogation qui passionnait l’écrivain Léonid Andreev (1871-1919), observateur intransigeant de ses contemporains, auteur d’une œuvre ensevelie après la révolution, et que Julien Gosselin nous permet de découvrir avec ses outils de prédilection, plateau, acteurs, et caméra à l’appui.
Le Passé de Léonid Andreev, mise en scène Julien Gosselin, du 7 au 8 octobre à la Passerelle (Saint-Brieuc), puis du 2 au 19 décembre à l’Odéon (Paris), dans le cadre du Festival d’automne, puis tournée.
Mal – Embriaguez Divina
Chorégraphe portugaise autant redevable aux cabarets berlinois les plus torves qu’à la BD underground la plus tripée, Marlene Monteiro Freitas présente une nouvelle comédie horrifique portée par une communauté de flics et roitelets ambiance Ubu Roi sous ecsta. Mal – Embriaguez Divina, créée au printemps à la Biennale de la danse de Lyon et en tournée française cet automne, est l’occasion d’halluciner devant la précision graphique de ses danseurs et les formes baroques prises par ses cauchemars.
Mal – Embriaguez Divina, ch. Marlene Monteiro Freitas, du 3 au 6 novembre au centre Pompidou et du 10 au 13 novembre au CDN de Montreuil /Festival d’automne à Paris
Pour autrui
L’originalité de Pauline Bureau est d’allier puissance romanesque et rigueur documentaire pour mettre sur le plateau des objets jusqu’alors non théâtraux. Après Mon cœur, à propos du scandale du Mediator, Hors la loi, sur la lutte pour la légalisation de l’IVG qui reconstituait le procès de Bobigny, ou encore Féminines à propos de la constitution d’une équipe de foot féminine, Pour autrui traite de la gestation pour autrui, c’est-à-dire d’amour, d’attente et de don, à travers une série de parcours individuels.
Pour autrui, texte et mise en scène de Pauline Bureau du 21 septembre au 17 octobre à la Colline (Paris), puis tournée.
Bros
«Il n’y a pas d’improvisations, seulement l’abysse du présent pur.» Vêtus d’uniformes de policiers des années 40 qui font écho à des scènes burlesques de cinéma, une vingtaine d’hommes exécutent sur scène les ordres qui leur parviennent par oreillettes. Dans Bros, dernière création de l’immense metteur en scène italien, les corps anonymes, changeant chaque soir, se prêtent ainsi à un jeu orchestré par une autorité. Un dispositif expérimental, qui entend interroger notre rapport complexe à la Loi.
Bros, de Romeo Castellucci, les 14 et 15 octobre à Valenciennes, du 19 au 22 octobre à Strasbourg, les 26 et 27 octobre à Martigues.
Grief & Beauty
Six acteurs sur le plateau, professionnels et amateurs, qui ont en commun de côtoyer la mort, qu’ils soient eux-mêmes malades, qu’ils accompagnent des mourants, qu’ils interprètent des disparus. Comme toujours, le grand documentariste suisse Milo Rau transcende son sujet en s’inspirant de la représentation de la mort dans l’art.
Grief & Beauty, de Milo Rau, 12 et 13 octobre au Tandem à Douai, du 16 au 18 novembre à la Rose des vents (Villeneuve-d’Ascq).
La Tendresse
Il y a trois ans, Désobéir faisait un carton imprévu en proposant le portrait de quatre jeunes femmes issues de l’immigration, qui évoquaient les injonctions à la féminité et l’instant de révolte décisif. Toutes les scènes s’arrachaient cette petite forme, et le public était au rendez-vous. Avec la Tendresse, Julie Berès interroge cette fois la fabrique du masculin, à travers sept jeunes hommes qui jonglent avec les assignations développées notamment par les fictions et le cinéma. Comment être un homme bien aujourd’hui ? On peut compter sur Julie Berès et ses complices Alice Zeniter, Lisa Guez, et Kevin Keiss pour balayer d’un grand coup ce qui peut sembler un peu convenu sur le papier.
La Tendresse, conception et mise en scène Julie Berès. Création à la Comédie de Reims du 16 au 20 novembre, puis grande tournée jusqu’en juin 2022.
La Trilogie des contes immoraux (pour Europe)
Bienvenue à Athènes, maison mère de notre civilisation, socle de notre pensée. Chez Phia Ménard, le Parthénon prend les atours d’une gigantesque maquette en carton prédécoupée qu’il s’agira pour elle, déguisée en Athéna Punk, d’ériger seule dans la sueur pendant une heure, entaillant la matière fragile à coups de tronçonneuse avant que la pluie ne vienne saccager le temple précieux.